Ce matin là

Je suis Charlie

Ce matin là, j’ai du mal à me réveiller, presque comme tous les matins… Les yeux qui piquent et qui se referment, le réveil qui insiste, les gestes approximatifs… Mon fils se lève avant que j’émerge complètement, tant pis pour moi, je dois m’occuper de lui maintenant. Son pyjama est mouillé, il est de très mauvaise humeur. C’est mon tour de l’emmener à l’école, son père est encore au lit, mais notre fils le réclame. Une journée comme ça ne promet rien de bon en général, j’aurai aimé ne pas avoir raison, pas à ce point là…

Je l’amène à l’école, il fait la moue parce que nous avons tenu bon, son papa est resté à la maison. Nous ne savons jamais s’il s’agit de réelle tristesse ou d’un caprice, il est difficile le matin quand il dort moins de quatorze heures (oui, je sais…). Je rentre, déjeune, et la fatigue se faisant sentir, je rejoins mon homme dans un lit tout chaud pour terminer ma nuit avec lui. Je ne l’entends presque pas se lever pour aller travailler en début d’après-midi… En revanche je l’entends rentrer 5 minutes plus tard, et les mots qu’il me crie me glacent le sang.

« Attentat », « rue S. L. »… Dans ma tête je ne veux pas faire le rapprochement. Rue S.L., une petite rue à sens unique qui débouche dans la rue de M., il n’y a qu’une chose, l’école maternelle de mon fils… La panique m’envahit, je saute du lit, bien réveillée cette fois. J’enfile des vêtements au hasard, nous courons jusqu’à l’école. Nous sommes arrêtés par un périmètre de police. Il y a beaucoup de monde, on parle de l’attentat le plus sanglant que la France, que Paris ait connu. De tout temps…

Nous mettons de trop longues minutes à comprendre que l’école n’a pas été touchée, mais nous ne pouvons y accéder. Les policiers nous rassurent, l’attentat a eu lieu dans un autre arrondissement. Nous commençons à nous sentir soulagés quand nous nous rendons compte que la voiture que les terroristes ont utilisée a été abandonnée devant l’école de mon fils, accidentée! Et s’ils s’étaient réfugiés dedans? A cette seule évocation, de violentes nausées secouent mon corps. Mon homme pleure…

Puis nous réalisons ce qui s’est passé à Charlie Hebdo, les décès des dessinateurs, morts pour la défense de leurs idées, et passons très vite du soulagement au plus profond écoeurement… Je suis encore en état de choc, se mélangent en moi plusieurs émotions, la peur que j’ai ressentie pour mon fils, la proximité immédiate du drame, l’atrocité, l’abjection, l’inutilité de cet évènement, la profonde tristesse pour les personnes disparues, connues ou non… Plus jamais ça… Ils n’ont pas cloué le bec aux libres penseurs en France, ils les ont secoués!

#JeSuisCharlie

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12 réflexions sur « Ce matin là »

  1. ….. Je ne peut qu’imaginer cette panique qui vous a envahie….
    Je ne me remet pas du drame et je suis à 800 km…

    Pleins de baiser.

    Nous sommes Liberté

  2. Je suis vraiment touchée par ton récit. Té sachant sur paris j’y ai pensé, mais tu décris l horreur de tout parent parfaitement. merci de l avoir fait.

  3. Je ne peux que comprendre. Je suis journaliste et il y a trois ans, nous vivions à Toulouse. J’étais au travail depuis quatre heures du matin lorsqu’un peu avant 9 heures, j’ai vu tomber une dépêche AFP sur mon bureau : plusieurs coups de feu devant une école rue J.D (affaire Merah)… Rue qu’empreintait chaque jour mon mari pour déposer notre fils chez sa nounou, puis se rendre au travail. J’ai sauté sur mon téléphone et priée comme jamais pour qu’ils aient été en retard ce matin-là. Ce fut fort heureusement le cas. J’ai ensuite appelé la nourrisse pour qu’elle reste enfermée toute la journée avec les enfants car elle avait l’habitude d’aller au parc devant l’école publique voisine. Mon mari, journaliste également, a été l’un des premiers sur les lieux du drame. Il a vu l’horreur. En rentrant le soir, il s’est effondré dans mes bras. Nous ne sommes pas prêts d’oublier cette journée.

  4. J’ai un grosse boule dans la gorge depuis mercredi, un poids sur le cœur aussi … mais je n’os imaginer ce que toi tu as du ressentir et comme à présent cela doit être difficile …

    Bises

    Angélique

  5. Ça m’a mis les larmes aux yeux… à des milliers de kilomètres mes pensées ont dessuite étées vers les maman des petits dès écoles alentours, ça a du être si dur

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